RED CARDELL

Red Cardell "Naître"
(Keltia Musique)

Plus qu'un simple album, "Naître" est le résultat d'une aventure musicale. Celle d'une rencontre entre Jean-Mich, Manu et Jean-Pierre, les trois "Cardell", et la scène Nationale du Théâtre de Cornouaille. Les seconds ont offert aux premiers du temps pour créer sur le thème du sens et de la transmission. Une idée qui trottait dans la tête des trois compères depuis "Sans fard" et qui a pris la forme d'un spectacle ("Red Cardell fait son bal") présenté au théâtre Max-Jacob de Quimper en mars dernier. Un spectacle que le groupe a décliné à sa manière sur un disque dont le trio a assuré la production. Certes, si la puissance que Red Cardell dégage sur scène ne s'y retrouve pas totalement, la magie, elle, est bien présente.

"Naître" est forcément l'histoire de chacun de nous : celle de la vie qui s'écoule. Des souvenirs et images précieusement gardés que Jean-Pierre Riou a mis en mot. De l'arrière du car ("Davaï") aux manèges des forains ("La fête au village"), transpire l'histoire d'un être, de sa naissance ("Naître" qui ouvre le spectacle) à l'âge adulte, que la mort attend sur le quai d'une gare ("Là où je vais"). Une vie sur laquelle se sont posés, comme à l'accoutumée, guitares, accordéon ("Le sable" sur lequel le spectacle se termine) et machines. Classique pour ce trio qui a fait du piano à bretelles son instrument fétiche. Pourtant, "Naître" marque aussi un changement. Outre la maison de disques - Keltia, c'est surtout la première fois que le trio s'ouvre aux sonorités extérieures. Ce besoin de faire appel à des musiciens additionnels s'est finalement imposé comme une évidence. L'ami Pierre Sangra, multi-instrumentiste bien connu (Thomas Fersen, pilier du label Tôt ou Tard), est venu apporter sa couleur musicale, sa touche personnelle aux compositions du groupe : violon sur "Poitou" ou "Kazaktchok", oud sur "La fête au village", mandoline et ukulélé sur "Naître". Un voyage en Ukraine ne fait que confirmer cette volonté nouvelle de s'ouvrir vers les autres musiques. A Kiev, ils enregistrent des chœurs (Iryna Klymenko, Olena Babienko, Olena Goncharenko), mais aussi des musiciens : le violon de Sergiy Okhrimchuk, la trompette de d'Evgeni Didik, la guimbarde de Vasyl Palanuk. Quant aux samples arrivés dans le groupe avec Manu, ils sont réenregistrés. Symbole de cette fusion, "Le cœur léger" voit Louise Ebrel accompagner les chœurs ukrainiens et la voix de Farid Aït Siameu, une vieille connaissance. Souvenir d'une autre époque, celle des Penfleps, un groupe dans lequel Jean-Michel Moal et Jean-Pierre Riou évoluaient en sa compagnie.

Véritable fusion des genres, "Naître" voit même les rappeurs d'Alktraxx répondre à Jean-Pierre sur "Davaï" ou "Cantine". Sans oublier, l'âme de cet album, la voix de Philomène, pour ne citer qu'elle. En bouleversant les habitudes, en empruntant des chemins divers, Red Cardell démontre à qui veut l'entendre que pour faire du rock, il faut aussi savoir oser. Un pari difficile mais ô combien payant.

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