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2 avril 2006

BRUCE SPRINGSTEEN

bsMais qu'ont-ils tous en ce moment avec la Country? Après les Little Willies de Norah Jones et avant d'aborder l'association entre Mark Knopfler et Emmylou Harris, voici le nouveau Bruce Springsteen consacré à des standards de la chanson américaine. L'album mélange Country et Folk pour des morceaux qui ont été chantés par Pete Seeger mais ne sont pas de lui. Le plus souvent il s'agit de chants traditionnels de la musique américaine.

Pour cet opus, Bruce Springsteen s'est entouré d'un big band privilégiant les instruments acoustiques traditionnels. On y trouve Sam Bardfeld (violon), Art Baron (tuba), Frank Bruno (guitare), Jeremy Chatzky (basse), Mark Clifford (banjo), Larry Eagle (batterie, percussions), Charles Giordano (orgue, accordéon, piano), Lisa Lowell (backing vocals), Ed Manion (saxophone), Mark Pender (trompette), Richie Rosenberg (trombone), Patti Scialfa (backing vocals) et Soozie Tyrell (violon). Notez aussi que quasi tous assurent des backing vocals.

La Country est particulièrement présente sur des titres comme "Jesse James", "John Henry" ou "My Oklahoma Home". Mais Springsteen y apporte sa touche et c'est tant mieux. Les vieux titres prennent ainsi une tournure plus actuelle sans pour autant les dénaturer. Le résultat est à la hauteur des qualités de l'artiste. Il suffit d'écouter "Mrs. McGrath" pour s'en convaincre. Il n'aurait pas dépareillé sur "Devils & Dust" avec ses tonalités irlandaises datant du début du 19e siècle. C'était une ballade anti-guerre. Tout un symbole!

Et que dire de "O Mary Don't You Weep", un négro-spiritual chanté par les noirs dans les églises à la Pentecôte. C'est aussi un chant traditionnel qui a été utilisé par le mouvement pour les droits civiques. Une chanson incontournable de l'histoire de la musique noire superbement reprise ici par Bruce! On ne s'en lasse pas!

"Erie Canal" est une chanson tombée dans le domaine public. Elle a été écrite par un certain Thomas S. Allen en 1905 et portait alors le titre "Low Bridge, Everybody Down". C'est devenu une chanson folk à laquelle Springsteen donne une nouvelle jeunesse. Le traditionnel "Jacob's Ladder" a évolué avec les époques. Les travailleurs du textile en ont écrit un couplet dans les années quarante et Pete Seeger en a ajouté un autre plus tard.

"Eyes On The Prize" est aussi connue sous les titres "Gospel Plow", "Paul and Silas" et "Hold On". Incroyable la touche du Boss dans ce morceau qui nous plonge en plein centre de La Nouvelle Orléans. L'ampleur du big band accompagnant Bruce prend ici toute sa signification. Superbe tant on sent que cela vient du coeur!

Le très mélancolique "Shenandoah" date du début du 19e siècle. Le Boss s'en montre tellement imprégné qu'il en fait un des meilleurs titres de l'album. Vous ne pourrez résister et pousserez la chansonnette. "Pay Me My Money Down" est le chant des noirs victimes de capitaines de navires peu scrupuleux qui quittaient le port en douce sans payer leurs travailleurs. Ce chant entraînant est le premier single sorti.

"We Shall Overcome" est une protest song politique adaptée par Pete Seeger. Elle a été popularisée durant la lutte pour les droits civiques. Springsteen l'a en fait enregistrée en 1997 à l'occasion d'un album tribute à Pete Seeger sorti un an plus tard. Ce fut d'ailleurs le point de départ qui guida le Boss vers ce nouvel opus. Quant à "Froggie Went A Courtin'", il s'agit d'une chanson écossaise datant de 1549.

L'édition spéciale de ce CD comprend un DVD avec un documentaire sorte de Making Of de l'album comprenant six chansons jouées en direct dans le salon qui servit de studio. Outre cela, vous y trouverez les commentaires de l'artiste et deux titres bonus audio inédits, "Buffalo Gals" et "How Can I Keep From Singing". Notez également le superbe packaging de l'ensemble, en ce compris le livret.

En résumé, ce nouvel album de Bruce Springsteen est un album à part. Tout d'abord, il s'agit du premier album de reprises de sa carrière. Ensuite, malgré le côté ancien des morceaux venant parfois du folklore local, le Boss arrive à tous les transcender à sa manière. Comme il le dit, toutes ses vieilles chansons doivent être remises au goût du jour pour reprendre vie et Springsteen a parfaitement réussi cela. Pas de doute, il est le Patron!

Pays: US
Columbia / Sony BMG 82876830742
Sortie: 2006/04/24

pete_seeger+ sur Pete Seeger: http://fr.wikipedia.org/wiki/Pete_Seeger

Jesse James was a lad/ That
killed many a man […]/ He
stole from the rich/ And
he gave to the poor […]


Jesse James était un garçon/
Qui a tué plus d'un homme
[…]/ Il volait les riches/
Et donnait aux pauvres […]

Jesse James

La chanson a été composée au lendemain de la mort du hors-la-loi. Et récrite par Woody Guthrie en 1939. Elle est exemplaire des murder ballads, genre ultraréaliste, voire sordide, déjà en vogue dans les îles Britanniques avant le départ des émigrants. En réalité, Jesse James, présenté comme un bandit au grand cœur, braqueur de banques et de trains postaux, n'avait pas que des qualités: il était esclavagiste et sécessionniste. Comme il faut une morale à la chanson pour l'édification du bon peuple, le héros finit, en général, au bout d'une corde. Exception à la règle, James mourra assassiné par un membre de sa bande. Avec le temps, le forçat va devenir, à son tour, un personnage récurrent, comme il le sera chez Johnny Cash. Car le folk est le chant de la dignité perdue et qu'on peine à recouvrer. Il est lié aux guerres d'Indépendance et de Sécession. Puis, à la lutte des Noirs. Aujourd'hui, à la dénonciation des iniquités de la vie sociale américaine, à commencer par son système pénitentiaire. Il y a peu, Nick Cave s'est réapproprié le genre, avec un concept-album justement intitulé Murder Ballads

Old Dan Tucker was a
fine old man/ Washed
his face in a fryin'pan
[…]/ Old Dan Tucker got
drunk and fell/ In the
fire and kicked up holy
hell/ A red-hot coal got
in his shoe/ And, oh my
Lord, the ashes flew […]


Old Dan Tucker était un
bon vieillard/ Il se lavait
le visage dans une poêle
à frire […]/ Un jour, il se
saoula, tomba/ Dans la
cheminée et botta dans
le feu/ Une braise entra
dans sa chaussure/
Et, oh, Dieu, les cendres volèrent […]

Old Dan Tucker

Une ballade écrite aux environs de 1843 par Dan Emmett, des Virginia Minstrels, qui conte les horribles et épouvantables faits et prouesses d'un fermier gargantuesque ayant vécu à la fin du XVIIIe siècle. Longs chants épiques qui chroniquent la vie des petites gens des Appalaches et des vallées encaissées du Kentucky (les hillbillies, les idiots de la colline), les airs traditionnels de la old time music, dont fait partie cette chanson, préfigurent le bluegrass, version instrumentale du genre, et la country. Souvent, le mineur de fond en est le héros. Ou bien un marin, dont le seul souci est de toucher sa paie en fin de semaine (Pay Me My Money Down, autre titre de l'album). Plus tard, ce sera le chômeur de la Dépression, celui des Raisins de la colère. Ou les hoboes, ces trimards qui sillonnent le pays sur les plates-formes des trains de marchandises. En les écoutant, on imagine les habitants d'un village, après un barn raising (mobilisation générale pour édifier une nouvelle grange), alignés en rang pour un square dance sur l'air d'un fiddle (le violon traditionnel), d'un banjo et d'un harmonica. Souvenir d'un temps, pas si lointain, où l'on se serrait les coudes autour du feu, en priant Dieu d'être épargné des Indiens, des loups et des ours.

We shall overcome
someday/ Oh glory, deep
in my heart/ I do
believe/ We shall overcome
someday […]/ Oh glory,
deep in my heart/ I do
believe/ We'll walk hand
in hand someday


Un jour, nous vaincrons/
Au fond de mon cœur/ Je le
crois vraiment/ Un jour,
nous vaincrons […]/ Au fond
de mon cœur/ Je le crois
vraiment/ Un jour, nous marcherons main dans la main

We Shall Overcome

Pete Seeger a accompagné le combat pour les droits civiques et les manifs monstres contre la guerre au Vietnam. Il reste la figure tutélaire des enragés américains, dont We Shall Overcome est l'hymne fétiche. A l'origine, ce negro spiritual, composé en 1901 par Charles Albert Tindley, s'intitulait I'll Overcome. Dans les années 1940, les grévistes de l'American Tobacco Company le dotent d'un pluriel (we), plus collectif et plus engagé. Au fil du temps, les paroles seront peu à peu modifiées. Sous l'impulsion de Pete Seeger, le will originel devient ainsi un shall, plus assertif. De même, le chanteur ajoute au moins un couplet (We'll walk hand in hand). Surtout, en déposant les droits de la chanson, Seeger a cherché à en éviter les détournements par l'industrie pop. Il a eu raison. Bruce Springsteen est payé pour le savoir: son Born in the USA - 15 millions d'albums vendus - qui racontait les désillusions d'un vétéran du Vietnam, a été récupéré pour son refrain («Né aux USA») par la droite reaganienne. Le protest song est souvent sec et dur. Dans son album, Springsteen donne une version quasi religieuse de We Shall Overcome.

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